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René Descartes - La raison, souveraine des passions | « zpět na seznam textůKliknutím SEM přehrajete celý text. (kliknutím na danou větu ji přehrajete)
Il est utile aussi de savoir qu’encore que les mouvements, tant de la glande que des esprits du cerveau, qui représentent à l’âme certains objets, soient naturellement joints avec ceux qui excitent en elle certaines passions, ils peuvent toutefois par habitude en être séparés, et joints à d’autres fort différents ; et même, que cette habitude peut être acquise par une seule action, et ne requiert point un long usage. Ainsi, lorsqu’on rencontre inopinément quelque chose de fort sale, en une viande qu’on mange avec appétit, la surprise de cette rencontre peut tellement changer la disposition du cerveau, qu’on ne pourra plus voir par après de telle viande qu’avec horreur, au lieu qu’on la mangeait auparavant avec plaisir. Et on peut remarquer la même chose dans les bêtes ; car encore qu’elles n’aient point de raison ni peut-être aucune pensée, tous les mouvements des esprits et de la glande qui excitent en nous les passions ne laissent pas d’être en elles, et d’y servir à entretenir et fortifier, non pas comme en nous les passions, mais les mouvements des nerfs et des muscles, qui ont coutume de les accompagner. Ainsi, lorsqu’un chien voit une perdrix, il est naturellement porté à courir vers elle ; et lorsqu’il oit* tirer un fusil, ce bruit l’incite naturellement à s’enfuir ; mais néanmoins on dresse ordinairement les chiens couchants en telle sorte, que la vue d’une perdrix fait qu’ils s’arrêtent, et que le bruit qu’ils oient après, lorsqu’on tire sur elle, fait qu’ils y accourent. Or ces choses sont utiles à savoir pour donner le courage à chacun d’étudier à régler ses passions. Car puisqu’on peut, avec un peu d’industrie, changer les mouvements du cerveau dans les animaux dépourvus de raison, il est évident qu’on le peut mieux encore dans les hommes ; et que ceux même qui ont les plus faibles âmes, pourraient acquérir un empire très absolu sur toutes leurs passions, si on employait assez d’industrie à les dresser et à les conduire.
* Il entend (verbe ouir) . « zpět na seznam textů
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